vendredi 3 mai 2019

Le cerveau humain : la plus grande merveille dans tout l'univers - Dialogue avec les lecteurs

Suite à la publication de mon article sur "Le cerveau humain : la plus grande merveille dans tout l'univers" sur le blog Totus Tuus, des lecteurs réagissent.

Commentaire n°1 posté par Miky

Salut Matthieu,

Il me semble que tu ressors une nouvelle fois le même argument :

1. Il était vraiment trop improbable que le cerveau humain existe tel qu'il est très précisément.

(2. Eludons le fait qu'il aurait pu exister ou ne pas exister de plusieurs milliards d'autres manières tout aussi improbables...)

3. Si Dieu existe, alors on comprend bien pourquoi le cerveau humain existe, et pourquoi il est exactement comme il est.

(4. Eludons la question de savoir s'il n'est pas éventuellement encore plus extraordinaire que Dieu existe qu'il n'est extraordinaire que le cerveau existe et qu'il soit comme il est)

5. Donc Dieu existe très probablement.

(6. Oublions, pour les besoins de la démonstration, le fait que les raisonnements abductifs (= des effets/symptômes vers la cause, du signe vers la signification...) sont entâchés d'une grande marge d'incertitude).

Réponse au Commentaire n°1

Cher Miky,

Je pense que la réflexion au sujet du fonctionnement conjoint des deux hémisphères de notre cerveau apporte un éclairage utile à la question de savoir s'il convient ou non d'appréhender le réel au moyen des seuls instruments de mesure fournis par la science. J'y vois comme une confirmation par la science elle-même de ce que j'écrivais il y a quelques temps à ce sujet.

Pour le reste, je n'élude pas tes objections, rassure-toi, et je compte bien y répondre. Un peu de patience…

Commentaire n°2 posté par Miky

Cher Matthieu,

J'attends avec impatience ton article en réponse à mes objections. En attendant, je me permets de t'en rajouter une supplémentaire ;-)

Tu dis : "Je pense que la réflexion au sujet du fonctionnement conjoint des deux hémisphères de notre cerveau apporte un éclairage utile à la question de savoir s'il convient ou non d'appréhender le réel au moyen des seuls instruments de mesure fournis par la science."

Outre que des considérations sur le cerveau humain peuvent difficilement appuyer sérieusement une conception épistémologique, je te ferais remarquer, tout d'abord, qu'en un certain sens je suis assez d'accord avec toi sur le fait qu'il ne convient pas d'appréhender le réel au moyen des seuls instruments de mesure fournis par la science : la science permet d'appréhender le réel du point de vue de la vérité, mais d'autres "méthodes" et capacités sont requises pour l'appréhender du point de vue du bien ou du beau par exemple.

Je suis aussi d'accord, en un certain sens, avec toi, pour dire que l'intuition peut contribuer à découvrir la vérité sur le réel. Mais tu n'ignores pas que les deux hémisphères cérébraux sont reliés entre eux, ce qui nous suggère, selon ta démarche, que l'intuition et l'intellect doivent aller de pair. Ainsi, l'intuition permet de trouver des hypothèses originales et innovantes, qu'ensuite une démarche intellectuelle permettra de formaliser et vérifier. L'intuition seule, sans le contrôle de l'intellect, risque de conduire à des hypothèses fausses. L'intellect seul, sans l'intuition, risque de passer à côté de certaines vérités.

Réponse au Commentaire n°2

Cher Miky,

Je me réjouis de ton dernier commentaire! La démarche que tu décris est d'ailleurs tout-à-fait celle de la métaphysique aristotélicienne (que je fais mienne, tu le sais, et qui consiste à raisonner à partir du réel, scientifiquement exploré). Elle légitime par ailleurs cette fameuse "alliance" entre la foi et la raison que tu sembles honnir pourtant.

Là où nous paraissons vraiment en discordance, Miky, c'est sur la juste portée qu'il convient d'accorder au raisonnement métaphysique.

Car si je te suis bien, seul ce qui est objet de science peut être objet de connaissance certaine. Le raisonnement logique ne serait à tes yeux que pure spéculation, stimulante certes sur le plan intellectuel, mais inefficace à nous en dire plus sur le réel que les sciences expérimentales.

C'est ce que tu m'écrivais récemment sur ton blog en commentaire de ton article sur la métaphysique expérimentale, en affirmant "ne pas rejeter a priori toute démarche métaphysique, mais contester qu'une telle démarche puisse fournir une connaissance universellement et objectivement valable (...). Pour moi, la métaphysique ne dit pas le réel, elle dit une certaine vision du monde."

J'essaierai de te démontrer que l'homme au contraire peut accéder à la plénitude de la vérité au moyen de sa raison spéculative, et qu'à l'inverse, cette vérité dans sa plénitude lui est irrémédiablement scellée s'il ne tient pour vrai que ce qui est démontrable scientifiquement.

Commentaire n°3 posté par Miky

Attention Matthieu : que le raisonnement logique, appliqué à la connaissance, permette d'en inférer de la connaissance ou du moins une croyance raisonnable, je ne le nie pas. Le problème c'est que les raisonnements que tu utilises pour justifier la croyance en Dieu ne sont justement pas logiquement valides, d'un point de vue formel. Je te l'ai dit, le raisonnement abductif doit être manié avec précaution, c'est la forme de raisonnement la moins sûre. Ainsi, on peut avoir mal à la gorge, avoir des courbartures, et avoir de la fièvre sans que ce soit le virus de la grippe qui en soit responsable.

Réponse au Commentaire n°3

Certes Miky, mais si tu as mal à la gorge, que tu as des courbatures et une forte fièvre, il est raisonnable de penser que tu es malade.

Et ce raisonnement rationnel, logique, qui part de l'observation du réel, me paraît tout à fait convenable pour être accueilli par tous, de manière objective et universelle.

Commentaire n°4 posté par Miky

Certes Matthieu, mais lorsque, ayant mal à la gorge, de la fièvre et des courbatures, je dis que je suis malade, je n'ajoute rien à ces symptômes, je les fais juste correspondre à une définition. Lorsque, de l'état de la nature, tu dis que c'est Dieu qui la créé, tu rajoutes un élément.

Réponse au Commentaire n°4

Mais toi aussi Miky tu rajoutes un élément! Tu rajoutes le concept de "maladie", beaucoup plus riche dans son contenu que les seuls symptômes observés. Mais tu le fais selon un raisonnement logique et rationnel qui te conduit naturellement à cette notion. Alors viendra, dans une deuxième étape, le temps de la recherche de la nature précise de cette maladie, et de son nom.

Commentaire n°5 posté par Miky

Le concept de maladie, s'il est plus riche que les symptômes observés, les contient néanmoins dans son extension. C'est-à-dire qu'être malade, c'est, par exemple, avoir mal à la gorge. Ce concept, du reste, préexiste à la constatation de ces symptômes, il n'en dérive pas. Je sais déjà que les maladies existent avant d'observer mon mal de gorge. 

Dans le cas de Dieu, le concept de Dieu n'implique ni qu'il créé le monde, ni qu'il le créé tel qu'on l'observe effectivement. En outre, je ne sais pas si Dieu existe avant d'observer la nature... et en bonne logique, je ne le sais pas non plus après :-) (ni même imparfaitement)

Admettons cependant que le concept de Dieu implique la création d'un monde tel qu'on le connaît. Ce concept implique également (et beaucoup plus sûrement) des tas de choses que personne n'observera jamais. Pourquoi donner foi à toutes ces implications inobservables ?

Si je créé un concept X tel que ce concept implique l'existence du monde tel qu'on le connaît (M) et rien d'autre qui ne soit pas observable, ce concept n'est-il pas une meilleure explication que le concept de Dieu ?

Mais si X => M (causalité), qu'il n'existe pas de Y différent de M tel que X => Y (on coupe au rasoir d'Occam toute implication inobservable donc inutile à rendre compte de M), et si, comme tu le soutiens, M => X (théologie naturelle). On a alors M <=> X. Le monde tel qu'on le connaît est sa propre explication métaphysique. Alors bien sûr, entre l'équivalence et l'identité numérique, il y a un pas. Mais en pratique, on considère comme numériquement identique ce qui s'équivaut parfaitement. Ex. : la chaleur et l'énergie cinétique moyenne. Ce pas, si on n'est pas obligé de le franchir, peut toutefois être accompli aisément et sans scrupule.

Réponse au Commentaire n°5

"Le concept de maladie, s'il est plus riche que les symptômes observés, les contient néanmoins dans son extension. C'est-à-dire qu'être malade, c'est, par exemple, avoir mal à la gorge. Ce concept, du reste, préexiste à la constatation de ces symptômes, il n'en dérive pas. Je sais déjà que les maladies existent avant d'observer mon mal de gorge."

Oui, mais le concept de maladie s’est forgé dans l’intelligence humaine lorsque des hommes en ont fait l’expérience. Il s'agit bien d'un concept dérivé du réel. Si je sais, moi, aujourd’hui, que les maladies existent avant d’éprouver mon mal de gorge, c’est parce que d’autres avant moi ont éprouvé le même mal et ont façonné à partir de là le concept de maladie – auquel on aura recours dès que certains symptômes manifestant une santé déficiente se feront jour. Tu n'aurais aucune idée de la maladie dans un monde où jamais personne ne tombe malade.

Eh bien : de même que les symptômes que tu décris nous révèlent que ton sujet est malade, de même, ce que nous savons aujourd'hui de l'univers nous révèle sa radicale contingence.

Autrement dit, l'univers ne peut pas raisonnablement constituer "sa propre explication métaphysique".  Car la contingence appelle la nécessité - puisqu'elle en procède nécessairement. Si l'univers est contingent - ce que nous révèle l'étude des sciences de l'univers -, il n'est pas l'être nécessaire. Et s'il n'est pas l'Être nécessaire - qui existe nécessairement, sans quoi il n'y aurait pas d'être contingent - , c'est que l'Être nécessaire est autre que l'univers. Affirmer que l'univers constitue "sa propre raison métaphysique" revient à confondre contingence et nécessité - ou à proclamer la nécessité de la contingence, ce qui est absurde (car contraire au principe d'identité). En outre, cela revient à dire que l'intelligence que nous observons dans la nature... est l'intelligence de la Nature elle-même! Cela constituerait un formidable bon en arrière - un retour au bon vieux panthéisme cosmique de Parménide et Héraclite. Tu as parfaitement le droit d'être panthéiste Miky si cela te chante. Mais il faut alors avoir l'honnêteté de reconnaître que tu n'es pas athée, car le panthéisme est une croyance religieuse.

Commentaire n°6 posté par Miky

Cher Matthieu,

Il me semble que ce que les sciences positives nous enseignent de l'univers ne permet pas de trancher entre les deux hypothèses : "intelligence DANS la nature" ou "intelligence DE la nature", puisque une éventuelle intelligence hors de la nature qui viendrait se transposer simplement à cette dernière n'est tout simplement pas observable par les sciences positives !

Il me semble que ce que les sciences positives nous enseignent de l'univers ne permet pas de trancher entre les deux hypothèses "Univers contingent" ou "Univers nécessaire". Il n'est pas dans leurs compétences de nous dire quoi que ce soit sur ce qu'en philosophie on appelle la modalité (c'est-à-dire le possible et le nécessaire), sauf bien entendu si on relativise cette modalité à l'intérieur du cadre de référence des lois physiques (il n'est pas possible qu'un objet décolle du sol sans être mû par une force, à cause de la gravité) ou plutôt de ce qu'on en connaît. Mais concernant le possible et le nécessaire métaphysique, elles sont impuissantes. Il est possible que l'univers nous paraisse contingent, mais cela peut être une impression fautive. L'univers pourrait bien être nécessaire malgré tout. Le crayon dans le verre d'eau a l'air cassé, mais c'est une impression fautive. Elle s'explique par la réfraction.

J'ajoute que rien n'empêche de supposer que notre univers, fini dans le temps et l'espace, et en devenir, soit "plongé" dans un super-univers spatio-temporellement infini et immuable.

Réponse au Commentaire n°6

Cher Miky,

Sur ta dernière remarque : tu as parfaitement le droit de le penser, mais reconnaît qu'il s'agit là d'un pur acte de foi qui ne repose sur aucune observation scientifique, ni sur aucune expérience.

Je suis d'accord avec toi pour dire que la science n'a pas pour objet de trancher la question philosophique de la cause première de l'intelligence observée dans la nature. Si Darwin avait pu te lire... Mais nous faisons ici de la métaphysique, Miky. Pourquoi vouloir à nouveau réduire le réel à ce que l’on peut en dire du seul point de vue scientifique ? Crois-tu pouvoir obtenir l’intelligence complète d’une toile de maître en considérant seulement les matériaux avec lesquels elle a été fabriquée (peinture, toile, pinceaux…). N’y a-t-il rien d’autre à dire du réel observé que ce qui en est directement perceptible par les sens, mesurable, calculable ?...

Il nous faut trancher la question de la cause première de l’intelligence présente dans la nature. Or, ce que la science observe du monde suffit amplement, me semble-t-il, à mettre sérieusement l'athéisme en difficulté - c'est un euphémisme. Si en effet l'athéisme est vrai, cela veut dire que l'univers est le seul être, l'être absolu (au sens étymologique du terme : "délié de toute relation de dépendance"), et qu'il n'y en a pas d'autre. Il a sa cause métaphysique en lui-même, ainsi que tu l'écrivais plus haut, et en nul autre que lui. Cela implique donc nécessairement qu'il n'ait pas eu de commencement, et qu'il existe de toute éternité, puisqu'on voit mal comment l'être absolu pourrait se donner l'être tout seul. Pour pouvoir se donner l'être, il faudrait déjà qu'il soit. Or, par définition, avant qu'il soit, il n'était pas.

Aussi, de deux choses l'une : ou bien l'univers est l'être absolu, au sens où je l'ai défini plus haut, ou bien il ne l'est pas. Mais s'il l'est, il existe donc par hypothèse de toute éternité et pour l'éternité.

Le problème est que l'astrophysique est en train de prouver le contraire - d'où ta tentative un peu désespérée de sauvegarder l'éternité de l'univers en affirmant que notre univers serait possiblement "plongé dans un super-univers spatio-temporellement infini et immuable" - ce qu'il conviendrait de penser, car comment rendre compte de cette "chute" de l'éternel dans la durée?

Par ailleurs, l'être absolu par définition ne vieillit pas, ne s'use pas, ne se dégrade pas de manière irréversible – il est immuable. Or, l'on sait aujourd'hui que l'univers est un système dans lequel toutes les compositions physiques vieillissent, s'usent et se dégradent de manière irréversible – et qu’un jour, lorsque l’expansion de l’univers aura achevé sa course et que toutes les étoiles seront éteintes, l’univers en son entier deviendra un gigantesque cadavre cosmique.

La vérité, c'est que l'athéisme, qui ne peut admettre ni le commencement de l'univers (que l'astrophysique est en train d'établir), ni son évolution (qui est pourtant le fait le plus universellement constaté), ni son irréversible usure et vieillissement (qui est pourtant inéluctablement programmée), est devenu une position intenable philosophiquement.

On peut décider d'être athée si l'on veut, mais il faut bien avoir conscience que l'on choisit alors une option en contradiction flagrante avec ce que les sciences positives nous enseignent de l'univers.

Commentaire n°7 posté par Bruno

Le deuxième principe de la thermodynamique montre que l'Univers (en tant que système fermé) aura une fin. Il a donc eu un commencement, et n'est pas éternel.

Il ne peut donc être l'Etre absolu.

L'Être absolu est nécessaire et éternel : on lui donne habituellement le nom de Dieu, ou YHVH: "je suis celui qui suis".

Quant à ses caractéristiques - les caractéristiques de Dieu - il faut lire les livres de l'ancienne alliance, connus aussi sous le nom d'Ancien Testament, ainsi que les témoignages de ceux qui ont connu le Christ - les Evangiles (cf. Nouveau Testament, ou Livres de la Nouvelle Alliance). 

Donc la science prouve Dieu [plus exactement, la science philosophique prouve Dieu au moyen des connaissances acquises par les sciences positives. NDLR], et la foi (ou la Révélation) indique ce qu'il faut penser de Dieu, ce qu'il faut "croire". Il y a le "je sais que Dieu existe" et "je crois que ..."

Elémentaire pour un esprit rationnel et scientifique qui part des faits et qui utilise la logique. 

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