jeudi 31 janvier 2019

Test : êtes-vous catholique?

Dans mon premier article de ce blog, je me suis présenté comme catholique. Il est très important de savoir ce que cela signifie afin que vous puissiez bien me situer et qu'il n'y ait pas la moindre équivoque dans nos discussions sur ce que peut être le fond de ma pensée.

Une lectrice du blog Totus Tuus, témoin de débats houleux avec un frère catholique – qui n'hésitait pas à anathémiser ceux qui n'étaient pas d'accord avec lui, dont votre serviteur – s’interrogeait sur ce qu’est un catholique. « Voyons, c'est une question bien difficile : qui est catholique ? Et qui peut le dire : celui-là est catholique, celui-là non? Quelles sont les conditions précises pour l'être ? La première des conditions n'est-elle pas d'aimer Jésus ? » 

Un autre lecteur lui faisait alors remarquer que « les protestants et les orthodoxes l'aiment aussi, donc ça ne suffit pas ».

Alors, qu'en est-il? Qu'est-ce qu'un catholique?

On pourrait définir le catholique ainsi : "Le catholique est celui qui, étant baptisé, croit et professe la doctrine de Jésus-Christ enseignée par l'Eglise catholique."

L'adhésion aux vérités de la foi enseignées par l'Eglise catholique est donc fondamentale pour me caractériser comme catholique. Si cette adhésion est totale, je suis catholique. Si elle n'est que partielle, je ne le suis peut-être plus. Comment savoir si ce que je crois – ou ne crois pas, ou ne crois plus – fait de moi encore un catholique? Voici un petit test, initialement publié sur le site de Cyril Brun - que je me suis permis de retoucher -, qui peut nous aider à faire le point. Répondez par OUI ou par NON aux questions posées. Puis consultez ensuite les résultats du test en bas de page. 

1. Croyez-vous en l'existence de Dieu ?
2. Croyez vous qu'il n'y a qu'un seul Dieu?
3. Croyez vous que le Dieu unique est Trinité : Père, Fils et Saint Esprit (trois personnes de même nature)?
4. Croyez vous que le Père a engendré de toute éternité le Fils ?
5. Croyez-vous que le Saint Esprit procède de toute éternité du Père et du Fils?
6. Croyez vous que Dieu est infini? (sans limitation dans son être)
7. Croyez-vous que Dieu est éternel (c'est-à-dire sans commencement ni fin - en dehors du temps) ?
8. Croyez-vous que Dieu est bon - qu'Il est Amour?
9. Croyez-vous que Dieu est tout-puissant?

10. Croyez-vous que Dieu a créé le monde visible et invisible (l'Univers physique et les anges) ?
11. Croyez-vous que la Création est une oeuvre de l'Amour de Dieu?
12. Croyez-vous au péché originel et à la Chute qu'il a provoqué ?
13. Croyez-vous qu’il fallait que l’homme fût racheté de ses péchés, et sa nature restaurée?

14. Croyez vous que Dieu s'est révélé à Israël, qu'Il a parlé aux patriarches et aux prophètes ?
15. Croyez-vous que la Bible est la Parole de Dieu?

16. Croyez-vous que Jésus-Christ est le Messie d'Israël ?
17. Croyez-vous que Jésus-Christ est vraiment Dieu : qu'Il est le Fils unique de Dieu incarné (la Deuxième Personne de la Trinité venue en notre humanité)?
18. Croyez-vous que Jésus-Christ est vraiment homme?
19. Croyez-vous que Jésus-Christ est né de la Vierge Marie ?
20. Croyez-vous que Jésus-Christ est mort sur la Croix pour le Salut des hommes?
21. Croyez-vous que Jésus-Christ est descendu au séjour des morts ?
22. Croyez-vous que Jésus-Christ est ressuscité des morts ?
23. Croyez-vous que Jésus-Christ est monté aux cieux et qu'Il règne à la droite du Père ?
24. Croyez-vous que le Saint Esprit a été envoyé sur les Disciples de Jésus au jour de la Pentecôte?

25. Croyez-vous à la vie éternelle ?
26. Croyez-vous au Jugement particulier à l'heure de notre mort?
27. Croyez-vous au Jugement dernier à la fin du monde?
28. Croyez-vous à la résurrection des morts à la fin des temps?
29. Croyez-vous au paradis et à l’enfer ?
30. Croyez-vous au purgatoire ?
31. Croyez-vous à l'intercession des saints ?

32. Croyez-vous en l'Eglise une, sainte, catholique et apostolique?
33. Croyez-vous que l’Eglise catholique est gouvernée par Jésus-Christ ressuscité, son Chef invisible?
34. Croyez-vous que le Saint-Esprit de Dieu œuvre dans l’Eglise ?
35. Croyez vous que l’Eglise est dépositaire de l’interprétation des Ecritures ?
36. Croyez-vous en la Tradition de l’Eglise catholique, enseignée et préservée par le Magistère de l’Eglise ?
37. Croyez-vous à l’infaillibilité du pape en matière de mœurs et de foi ?
38. Croyez-vous que l’Eglise est dépositaire du pouvoir des clefs (c'est-à-dire du pouvoir d’ouvrir et de fermer les portes du ciel) ?
39. Croyez-vous que l’Eglise est le lieu où Dieu dispense ordinairement aux hommes les fruits de la Rédemption du Christ ?

40. Croyez-vous à la grâce (action sanctifiante de Dieu envers les hommes) ?
41. Croyez-vous aux sacrements (signes efficaces de l’action de Dieu par l’intermédiaire de l’Eglise)?
42. Croyez-vous que le baptême est nécessaire au Salut de tout homme ?
43. Croyez-vous que le baptême nous sauve du péché et efface les conséquences du péché originel en nous ?
44. Croyez-vous que le baptême fait de nous des enfants de Dieu?
45. Croyez vous à la présence réelle (et non symbolique) de Jésus-Christ dans l’eucharistie ?
46. Croyez-vous au sacrement de l’Ordre qui met des hommes (prêtres, diacres, évêques) au service de ’Eglise et de Dieu pour le salut de toute l’humanité ?
47. Croyez-vous au sacrement de pénitence pour le pardon des péchés qui restaure en nous la grâce baptismale ?
48. Croyez-vous au mariage comme sacrement, donc indissoluble ?

49. Croyez-vous à l’Immaculée conception de la Vierge Marie (c'est-à-dire que Marie a été conçue préservée du Péché originel) ?
50. Croyez-vous en la Virginité perpétuelle de Marie?

Résultats :

1/ Vous n’avez que des réponses positives

Vous êtes catholiques en pleine communion avec l’Eglise romaine. Ce qui veut dire que vous adhérez à la totalité de la foi de l’Eglise et que vous cherchez à vivre de cette foi. Cela ne veut pas dire que vous êtes déjà un saint et que tous les préceptes de l’Eglise sont faciles tous les jours pour vous, mais vous tentez de les vivre et de progresser dans cette vie en vue d’une union intime avec Dieu.

2/ Vous avez quelques réponses négatives

Vérifiez si ces réponses sont des NON catégoriques ou des doutes. Dans le second cas, douter n’est pas ne pas croire et douter appelle un acte de foi et de raison. Dans le premier cas, vérifiez la cohérence de votre foi, car la foi de l’Eglise est telle qu’il est impossible de ne pas adhérer à un des points de la foi sans que tout l’édifice spirituel ne s’effondre. La foi est cohérente en elle-même. On ne peut être catholique pour un bout et refuser le reste. Approfondissez votre réflexion et refaites le test, soit vous gagnerez des OUI soit vous gagnerez des NON. Reportez vous alors au numéros 1 ou 3 selon le résultat.

3/ vous avez de nombreuses réponses négatives

Vérifiez s’il s’agit de doutes ou de certitudes. Si vos NON sont catégoriques, vous avez une foi qui est différente de celle de l’Eglise. C’est votre foi, votre choix, votre droit. Mais vous ne pouvez vous dire catholique.
L’Eglise catholique, parce qu’elle est le corps même du Christ est un vêtement trop grand pour l’homme. Deux solutions se présentent donc à lui : ou grandir à la taille du manteau ou tailler le manteau à sa propre taille. Dans ce dernier cas, le manteau ne peut être celui de l’Eglise catholique. Il faut donc en tirer les conclusions qui s’imposent et ne pas chercher à transformer l’Eglise en sa propre Eglise. A ce niveau de refus, il vaut mieux créer sa propre Eglise, ou rechercher la religion qui vous semble correspondre à votre foi et ainsi être en vérité avec vous même. Si malgré ces refus quelque chose vous pousse à rester dans l’Eglise, alors considérez l’Eglise comme votre mère et essayer de grandir à la taille du manteau quelqu’en soit les difficultés, les peurs, les renoncements.

4/ Vous n’arrivez pas à répondre, vous avez des doutes, des questions, des incompréhensions

mardi 29 janvier 2019

La Terre : une planète spécialement configurée pour donner la vie - Dialogue avec les lecteurs

Suite à la publication de mon article sur la Terre, notre ami Miky réagit.

Commentaire n°1 posté par Miky

Cher Matthieu,

Comme tu peux t'en douter, on ne va pas être d'accord ! Je n'ai pas trop le temps de développer ma pensée, donc je vais juste lancer quelques idées que je pourrais approfondir si tu le souhaites.

En gros, tu nous suggères de contempler la beauté de l'univers et que cette beauté serait un argument favorable à l'existence de Dieu. Toutefois, la beauté est une notion relative. Peut-être qu'une civilisation extraterrestre ne trouverait pas belles les mêmes choses que nous.

Le fait que nous trouvions beaucoup de choses belles doit être balancé par le fait que nous en trouvons aussi beaucoup qui ne sont pas belles voire qui sont carrément moches : champignons nucléaires, pourrissement, maladies, purulence, violence, malformations, amputations, décrépitude, etc. Si la beauté doit être un argument en faveur de l'existence de Dieu, alors l'absence de beauté et la mocheté doivent être, en toute logique, des arguments en défaveur de l'existence de Dieu. 

Le fait que nous trouvions beaucoup de choses belles peut être expliqué autrement : par un mécanisme néodarwinien de sélection naturelle des mutations avantageuses pour la survie et la reproduction. Prenons deux individus : un trouve qu'il vit dans un environnement formidable, beau, stimulant, l'autre trouve qu'il vit dans un environnement horrible, moche, ennuyant. Lequel, selon toi, aura le plus de chance de survivre et de se reproduire ?

Même si nous n'avions aucune explication de la beauté que nous percevons dans le monde, cela ne nous autoriserait pas logiquement à en inférer l'existence d'un Créateur. Cela voudrait juste dire que nous ne savons pas tout, et ça, nous le savons déjà ! Celui qui, ne supportant pas son ignorance, s'invente un "Dieu des trous" ne fait que couvrir son ignorance d'un peu de dignité, mais ne résout fondamentalement rien. Pour rendre compte de quelque chose de mystérieux, il pose une hypothèse encore plus mystérieuse : d'où vient Dieu ? Pourquoi a-t-il créé le monde ? Pourquoi l'a-t-il créé ainsi qu'il l’a créé ? Si on pousse ta logique jusqu'au bout, le fait même que Dieu ait eu l'intention, le projet, de créer un monde beau devrait nous interroger et nous faire admettre l'existence d'un Méta-Dieu qui a créé cette intention, ce projet, en Dieu, et ainsi de suite... La régression à l'infini n'est pas évitée.  

Enfin, je n'ai rien contre le fait que l'on croit en Dieu, mais je pense qu'il faut être vigilant quant aux motifs que l'on se donne d'y croire. Si ton but, à travers cette série d'articles, est de démontrer rationnellement et/ou empiriquement seulement, l'existence (probable) de Dieu, ton entreprise est vouée à l'échec, car les exigences de la rationalité et de l'empirie ne sont pas respectés, et pour cause : une explication scientifique doit relier logiquement des faits empiriques objectifs. Dieu est peut-être logique, mais il n'est certainement pas entièrement observable objectivement. J'enfonce le clou : si Dieu était une hypothèse scientifique valable, il ne serait pas Dieu, car il existerait au même titre que les êtres humains, les animaux, les plantes, les minéraux, les artéfacts, etc. A mon avis, toute approche possible de Dieu se doit de déborder le cadre de la science voire de s'en détacher. Mais il faut définir un nouveau cadre de référence, un nouveau paradigme si tu préfères, avant de pouvoir approcher Dieu, à l'intérieur de ce paradigme. Et ce paradigme doit s'efforcer, à mon avis, de reposer sur le sens commun ou la science, pour qu'il soit convainquant pour tous.

Note bien que je ne me contredis pas en disant d'une part : Dieu ne peut être scientifiquement prouvé, et d'autre part un paradigme à l'intérieur duquel Dieu peut être prouvé devrait s'efforcer de reposer sur le sens commun et la science. Ce sont deux idées différentes.

Commentaire n°2 posté par RV

Miky a dit : "Dieu est peut-être logique, mais il n'est certainement pas entièrement observable objectivement."

Erreur : il est observable sous la forme d'un mystère : celui de l'eucharistie.

Amitiés !

PS. Et encore bravo à Matthieu pour la très grande qualité de ses écrits. Je pense que son blog va faire énormément de bien !

Commentaire n°3 posté par Miky

@RV : A supposer même qu'il y ait quelque chose d'inattendu qui se produise dans l'hostie lorsqu'elle est consacrée, rien n'indiquerait que ce serait Dieu le responsable. Ce serait une hypothèse, mais d'ordre métaphysique car invérifiable. Scientifiquement, on serait juste en face d'un phénomène bizarre, que l'on n'arriverait pas à expliquer (du moins pour le moment).

@Matthieu : Je note bien que dans ton introduction tu dis : "Nous allons voir que si l’on ne peut pas prouver scientifiquement (au sens moderne du mot) que Dieu existe, on peut démontrer aisément, je le pense, qu’il est raisonnable de croire, et même davantage : qu’il est plus raisonnable de croire que de ne pas croire."

Raisonnable sonne en moi comme relatif à la raison, à la rationalité. Si un comportement rationnel (une croyance par exemple) est un comportement qui nous aide à vivre, alors d'accord, il est raisonnable de croire en Dieu car cela met de l'espérance dans notre vie, c'est donc utile en pratique que Dieu existe ou non.

Mais si tu dis qu'il est raisonnable de croire parce que l'objet de cette croyance (et non pas l'attitude de croire) disposerait lui-même d'appuis rationnels, alors je pense qu'il y a peut-être un problème.

Il faudrait que tu définisses dans quel type de rationalité tu te places. Du point de vue de la rationalité scientifique, et même de la rationalité pré-scientifique de l'observation directe avec les sens de la nature, il n'y a pas lieu de croire en Dieu. Du point de vue de la pure logique, il n'y a pas lieu de croire en Dieu non plus. J'ai l'impression que tu es d'accord que la science ou la logique ne peuvent prouver Dieu mais que tu penses que l'observation simple, empirique, du sens commun, pourrait prouver Dieu. Seulement ce que la science étudie, c'est d'abord ce que le sens commun nous révèle. Et le sens commun ne nous montre pas Dieu. En argumentant sur la beauté pour prouver Dieu, quel est ton but ? Si tu veux "poétiquement persuader" l'impie en évoquant en lui des sentiments mystiques, vas-y de bon coeur, mais si tu veux montrer que la beauté (toute relative et partielle) du monde ne peut pas s'expliquer autrement que par Dieu, alors tu n'y arriveras pas. Moi aussi, en contemplant un coucher de Soleil, je suis ému. On peut éprouver des sentiments "religieux" en étant athée. Mais il faut distinguer sentiments religieux et croyances religieuses. Passer des premiers aux seconds ne me paraît pas forcément raisonnable.

Réponse au Commentaire n°1
Réponse au Commentaire n°3

Cher Miky, tu dis : "Il faudrait que tu définisses dans quel type de rationalité tu te places." Eh bien, je vais te répondre en citant un passage de ton Commentaire n°1 plus haut : "il faut définir un nouveau cadre de référence, un nouveau paradigme si tu préfères, avant de pouvoir approcher Dieu, à l'intérieur de ce paradigme. Et ce paradigme doit s'efforcer, à mon avis, de reposer sur le sens commun ou la science, pour qu'il soit convainquant pour tous."

Ce paradigme – ou cadre de référence – à l’intérieur duquel je me situe, c’est ce qu’on appelle communément, d’un gros mot, la métaphysique, qui ne consiste pas en des élucubrations vaseuses,  absconses et arbitraires sans aucun fondement dans l'expérience – comme tu sembles le sous-entendre en écrivant que ce qui est "d’ordre métaphysique" est "invérifiable" –, mais qui est une véritable discipline de pensée posant des conclusions certaines à partir de prémisses indiscutables – en l'occurrence : le fait de la réalité objective explorée scientifiquement –, cela au moyen d'un raisonnement logique correct – c'est-à-dire : expurgé de tout paralogisme ou préjugé. Sous ce rapport, la métaphysique est une science, qui prolonge la méthode de raisonnement fondée sur l’expérience sensible – laquelle a fait ses preuves dans le domaine des sciences positives – pour atteindre le réel dans ce qu’il a d’inaccessible à nos instruments d’observation et de calcul.

Autrement dit : c'est la science et la logique articulés ensemble qui conduisent à l'existence de Dieu. Ce qui fait la vérité des propositions métaphysiques est cela même qui fait la vérité des propositions scientifiques, à savoir : l’expérience et le raisonnement. La métaphysique véritable s’efforce "de reposer sur le sens commun ou la science pour [être] convainquant pour tous".

Dès lors : si Dieu ne peut être prouvé scientifiquement, c'est entendu – puisqu’il n’est pas un objet de ce monde –, la métaphysique est précisément le "paradigme à l'intérieur duquel Dieu peut être prouvé" dans la mesure où elle repose "sur le sens commun et la science." Ce ne sont pas là deux idées contradictoires. "Ce sont deux idées différentes."

dimanche 27 janvier 2019

La Terre : une planète spécialement configurée pour donner la vie


En quoi la Nature nous parle-t-elle de Dieu ?

Adoptons un instant une attitude contemplative.

Regardons les terres, les océans, les montagnes, les étoiles dans le ciel...

Abraham Lincoln disait : "J’arrive à comprendre qu’il soit possible de regarder la terre et d’être athée. Mais je ne comprends pas qu’on puisse lever la nuit les yeux sur le ciel et dire qu’il n’y a pas de Dieu."

Notre univers, dont la science nous montre chaque jour l’extraordinaire complexité, est prodigieux et merveilleux. Comment ne pourrait-il pas constituer un premier signe évident de l’existence de Dieu ?

Regardons tout d'abord la Terre - notre planète Terre.

Nous sommes installés sur cette étonnante boule ronde de 12.800 kilomètres de diamètre et 6 trillions de tonnes. Cette boule "flotte" dans l'espace ; elle n’est soutenue par rien. Elle fait un tour complet sur elle-même en un jour, à la vitesse d’environ 1.000 km/h à l’équateur. Elle décrit autour du soleil une orbite en forme d’ellipse d'un rayon de 150 millions de kilomètres à la vitesse moyenne de 108.000 kilomètres à l’heure.

De toutes les merveilles de notre système solaire, de tout ce que l'on peut observer et admirer dans l'Univers, la Terre est assurément l’astre le plus fascinant. Elle est la seule planète - parmi toutes celles que nous connaissons - qui réunisse toutes les conditions nécessaires à l'émergence de la vie.

La première de ces conditions est l'existence d'une atmosphère agissant vis-à-vis du soleil comme un gigantesque filtre. La couche d’ozone absorbe les ultraviolets, très énergétiques et très nocifs - sans elle, toutes formes de vie seraient brûlées. A titre de comparaison, sur Vénus, les températures sont de 400°C à 500°C la nuit comme le jour. D'un autre côté, l'atmosphère conserve une partie de l'énergie reçue du soleil, permettant de garder la chaleur et d'éviter un refroidissement mortel ; sans ce phénomène - qu'on appelle l'effet de serre - aucune vie ne serait possible. Sur la Lune qui n’a presque pas d’atmosphère, la température de la nuit atteint presque celle du vide spatial, une centaine de degrés Celsius en dessous de zéro : invivable.

Lorsque nous levons les yeux vers le ciel bleu azur, réalisons-nous l'importance vitale de cette couche atmosphérique qui nous enveloppe et nous protège ?

Il y aurait beaucoup d'autres choses à dire sur notre fantastique planète. En particulier sur les propriétés physiques et chimiques des constituants élémentaires de la cellule, tels que l’eau, le gaz carbonique, l’oxygène, l’ADN, les protéines… Comme l’écrit le biochimiste et généticien américain Michael Denton : "Toutes les données à notre disposition suggèrent que les caractéristiques chimiques et physiques de tous les atomes et de toutes les molécules qui constituent les êtres vivants doivent être précisément ce qu’elles sont, sans quoi la vie serait impossible" (Michael DENTON, L’évolution a-t-elle un sens ?, Fayard, 1997)

La vie résulte donc d'un nombre incalculable de paramètres dont chacun est absolument indispensable : qu'il en vienne à manquer un seul, et la vie est impossible. Rien de plus improbable donc - de quasi-miraculeux - que la vie. Sans compter que son apparition reste un mystère : même lorsque toutes les conditions sont réunies et optimisées en laboratoire, on n'arrive pas à créer de la vie à partir de la matière inerte. La vie échappe encore à toute tentative d'explication scientifique. Elle résiste à toutes les expériences physico-chimiques entreprises pour la susciter. Cela paraît incroyable, mais aujourd'hui encore, en 2019, les savants sont incapables de nous dire comment la vie a pu jaillir de la non-vie. Voilà pourquoi il existe peu de chance que la vie existe ailleurs que sur la Terre. Parce que les probabilités de trouver une autre Terre ailleurs sont infinitésimales - au regard du caractère fini de l'Univers. Et parce que quand bien même on en trouverait une, rien ne dit qu'il y aurait de la vie, car rien ne dit que la vie procède naturellement des conditions nécessaires à son émergence.

Mesurons-nous la chance d’être nés sur cette étonnante planète qu’est la Terre - cette extraordinaire machine qui paraît unique dans l'Univers, et spécialement configurée pour faire surgir la vie?


Discussion avec les lecteurs suite à la publication de cet article

samedi 26 janvier 2019

Catéchèse P. Billecocq (1) - Un cours de catéchisme

Avertissement : l'abbé Gabriel Billecocq est prêtre de la Fraternité Saint Pie X qui se situe depuis 1988 en dehors de l'Eglise catholique. Je diffuse son petit catéchisme dans la mesure où il enseigne fidèlement la foi catholique et en raison aussi de ses talents pédagogiques indéniables dont je trouve qu'il serait dommage de se priver. Recevons avec bienveillance son enseignement et prions pour que la Fraternité Saint Pie X retrouve un jour - et le plus tôt sera le mieux - le chemin de la pleine communion avec Rome.

vendredi 25 janvier 2019

Y a-t-il une vérité pour la science? - Dialogue avec un lecteur

Un lecteur réagit à un passage de mon article sur la théologie, celui où j'écris : "Par nature, le théologien est un disciple. De même que le savant reçoit sa science des informations communiquées par l'Univers physique à l'enseignement duquel il se plie sans discuter - de même, le théologien nourrit son intelligences des informations communiquées dans Sa Révélation par Dieu à l'enseignement duquel il se soumet sans contester - et comment le pourrait-il? Il n'a aucun moyen de vérifier par lui-même si ce que Dieu dit est vrai ou non. Il n'a d'autre choix que d'y croire. Cela dit, s'il y croit, c'est qu'il a des raisons d'y croire - des raisons de penser que Dieu est digne de confiance lorsqu'il l'instruit de vérités mystérieuses. Voilà pourquoi la raison est si essentielle à la foi : enlevez la raison, et la foi finira par tomber - comme un peintre se cassera la figure si vous lui retirez l'échelle sur laquelle il est installé."

S'ensuit le dialogue suivant :

Jean-Pierre : Vous dites : "De même que le savant reçoit sa science des informations communiquées par l'Univers physique à l'enseignement duquel il se plie sans discuter..." Ouh là là, quelle drôle d'affirmation. En science, il n'y a pas de vérité absolue, c'est tout le contraire. On bâtit un modèle en fonction des résultats expérimentaux (les information communiquées), mais il suffit d'une information nouvelle contradictoire pour que l'on passe à un nouveau modèle.

Matthieu : Jean-Pierre, en science, il y a bien la recherche d'une vérité absolue. C'est pourquoi on change de modèle quand une information nouvelle provenant de l'Univers nous est connue. Car c'est la vérité que l'on recherche, et c'est le réel objectif qui commande. On se plie sans discuter à son enseignement. On ne cherche pas à imposer sa théorie au réel.

Jean-Pierre : Avant Pasteur, on croyait à la génération spontanée. C'était bien évidement faux. Heureusement que Pasteur ne s'est pas plié sans discuter à cet enseignement.

Matthieu : Oui, et c'était faux par rapport à quoi? :)

Jean-Pierre : Par rapport à ce que l'on sait actuellement.

Matthieu : A ce que l'on sait de quoi? :)

Jean-Pierre : ...

Matthieu : Heureusement que Pasteur s'est plié sans discuter aux enseignements du réel. Cela lui a permis de réfuter la théorie de la génération spontanée qui ne lui était pas conforme.

Jean Pierre : "De même le savant construit la science à partir des informations qu'il tire de l'Univers physique, en discutant les différentes théories en place" serait plus précis. Actuellement, c'est le big-bazar en physique : "Elaborer une théorie de gravitation quantique a été l’un des objectifs majeurs de la physique théorique depuis un siècle. Sans succès. Les difficultés sont immenses. Il existe néanmoins des voies prometteuses : la théorie des cordes, la gravitation quantique à boucles, la triangulation dynamique causale, la sécurité asymptotique, la géométrie non-commutative, les ensembles causaux, etc. Toutes ces approches ont leurs intérêts et leurs défauts. Aucune n’est consensuelle. Aucune n’est sans faiblesse du point de vue mathématique. Et, surtout, aucune ne jouit de la moindre corroboration expérimentale. Chaque communauté poursuit les calculs et tente d’en tirer les conséquences." On est loin d'une science à laquelle on se plie sans discuter ;-)

Matthieu : Je n'ai pas dit qu'on se pliait à une science. J'ai dit que le scientifique se pliait aux enseignements de l'Univers physique. ;) Toute l'histoire de la science prouve "la nécessité de corriger sa propre pensée et de sortir de soi pour trouver la vérité objective" (Gaston Bachelard, in "La formation de l'esprit scientifique").

jeudi 24 janvier 2019

Le professeur et l'aumônier

Voici un article de témoignage publié il y a quelques années sur Totus Tuus, que je réédite pour vous après l'avoir relu et légèrement retouché.

Ainsi que je l’ai déjà écris, j’ai toujours cru en l’existence de Dieu.

Pour autant, je n’ai pas eu d’éducation religieuse par mes parents. Mon père était résolument athée, considérant toutes croyances comme autant de "superstitions". Ma mère était surtout soucieuse de mon éducation morale. Je lui dois beaucoup d’ailleurs ; sans elle, je serais certainement devenu un délinquant, à l’âge de l’adolescence en particulier où j’aurais vraiment pu basculer. Malgré cela : pas d’éducation spirituelle, pas d’éveil à la vie de prière, pas de discussions sur Dieu, sur la vie de Jésus ou sur l’Eglise, pas de pieuses lectures comme tant de familles chrétiennes où l’on se nourrit de la Parole de Dieu et de la vie des Saints.

Je n’en veux à personne, ni à mon défunt père à qui je dois d’avoir goûté la tendresse du Père des Cieux ; ni à ma chère mère qui a fortement contribué à ma construction humaine. Et d’autant moins que le Seigneur a finalement tout arrangé... :)

Je dois tout de même à mes parents de m’avoir inscrit dans une école privée catholique à Amiens où j’allais pour la première fois entendre parler de Jésus.

Les frères qui nous enseignaient étaient des gens tout à fait ordinaires. Habillés en civil, ils ne se distinguaient pas du reste du monde. Pour le petit garçon de 8 ans que j’étais, rien ne "détonnait" dans leur comportement. Je ne me suis même jamais posé la question de savoir pourquoi on les appelait "frères". Non, on les appelait comme ça, voilà tout. Certainement même que le mot "frère" était synonyme de "professeur". Certains étaient forts gentils avec moi, d’autres forts sévères. Tout comme les autres, qui n’étaient pas "frères". Bref, ce ne sont pas eux qui m’ont parlé de Jésus.

Les cours de catéchisme étaient vraiment formidables. C’était le seul moment où l’on pouvait chahuter dans la classe et s’envoyer des avions en papier sans se faire engueuler. Nous savions que la dame catéchiste "tendrait l’autre joue", et que la colère est un vilain péché. Pas de risque donc qu'elle s'emporte. Bref, ce n’est pas là que j’ai entendu parler de Jésus.

J’ai tellement peu entendu parler de Jésus dans cette école catholique que j’ai refusé de faire ma première communion quand l’occasion se présenta. J’étais alors très "idéaliste", et je voyais bien comment mes camarades vivaient la préparation de cet événement : les uns parlait avec des scintillements dans les yeux… de la jolie montre qui leur serait offerte, les autres du jeu électronique tant rêvé qui leur était promis ce jour-là. En mon for intérieur, j’étais révolté ; je ne me reconnaissais pas dans cette mascarade, je ne voulais pas y participer. Aussi, j’ai dit NON.

Parce que personne ne m’avait vraiment parlé de Jésus.

Personne… Sauf peut-être ce professeur de CM1, un jeune laïc de 35 ans, passionné de Jésus, qui nous en a parlé deux ou trois fois dans l’année, mais d’une manière telle que je l’ai jamais oublié.

Je me souviens en particulier d’un temps de réflexion sur le Saint Suaire de Turin, et d’un autre sur la crucifixion au cours duquel ce professeur nous expliquait la mort à petit feu et par asphyxie du condamné : "dans la position du crucifié, les muscles des épaules, pectoraux et intercostaux soutiennent le corps, et se fatiguent rapidement. Or, ces muscles sont ceux qui assurent la respiration. Pour les soulager, le condamné se soulève sur ses pieds encloués, créant une nouvelle douleur. Les muscles des jambes se fatiguent à leur tour et le corps retombe. Cette alternance entre blocage et détente respiratoire finit par créer des crampes conduisant à l'asphyxie. Pour accélérer la mort, les jambes du condamné sont brisées à la barre de fer (crurifragium). Le condamné ne peut plus alors se redresser et s'épuise rapidement." (Source : Wikipedia)

A une autre occasion (sans doute autour de Pâques), il nous projeta en salle audio-visuelle le film de Franco Zeffirelli : Jésus de Nazareth. De ce premier visionnage, j’ai été très marqué par la scène de la Croix sur laquelle Jésus, l’Innocent par excellence, meure ignominieusement dans la solitude et l’abandon. Déjà, la Croix de Jésus s’imprimait dans mon âme. Une grande affection naissait alors en moi pour cet homme qui avait tant souffert et tant aimé - jusqu’à ses bourreaux sur qui il implorait la Miséricorde du Père : "Père, pardonne leur, ils ne savent pas ce qu’ils font"

(Je ne percevais pas à cette époque que Jésus il fût Dieu et j'ignorais qu’il fût ressuscité le troisième jour après sa mort – je devais penser à autre chose quand on m’en parla en cours de cathé... Pour moi, Jésus était un modèle, une référence, un "sommet de l’humanité" comme disait Gandhi. Mais il n’était qu’une grande figure de l’histoire, à l’image d’un Général de Gaulle, d’un Napoléon ou d’un Martin Luther King. C’est à l’âge de 25 ans que j’allais découvrir la vérité sur son identité et sur son œuvre – en une rencontre fulgurante avec lui, le Vivant.)

Ce jeune professeur laïc de CM1 ne saura sans doute jamais l’importance qu’il a eue dans ma vie de foi. Ce n’est même véritablement que maintenant que j’en prends moi-même conscience, rétrospectivement.

Un autre homme aura sans doute joué un rôle essentiel pour moi à cette époque : l’aumônier de l’Ecole. Là, c’était surprenant. Autant les "frères" étaient en fait des professeurs qui de français ou de latin, qui de mathématiques…, autant ce jeune abbé n’enseignait rien. Son seul travail, c’était de nous parler de belles choses. De l’amour, du respect que l’on doit aux autres, du pardon, de la paix, de la joie… Sa matière à lui, c’était la vie. C’était bien agréable de l’écouter. Il était d’une gentillesse exquise, d’une très grande douceur. Je ne me souviens pas l’avoir entendu parlé explicitement de Jésus (même s’il a dû le faire !), mais je me souviens d'avoir été impressionné par ce qu’il était, tout simplement : un homme chargé de parler de Dieu, de Jésus et des belles choses de la vie... à plein temps! J’allais apprendre quelques années plus tard qu’il s’agissait d’un prêtre. Oui (et là, je m’adresse aux prêtres qui peut-être me lisent), son témoignage au Père aumônier, le seul qui m’ait vraiment touché, ce n’est pas une parole de sa bouche, ce n’est pas un sermon enflammé, ce n’est pas même un beau geste qui m’aurait marqué : c’est le fait même qu’il soit prêtre. Ce faisant, il était pour moi le témoin de quelque chose de grand et de beau, de suffisamment grand et beau en tout cas pour qu’on lui consacre toute sa vie.

A la réflexion, j’ai sans doute refusé de faire ma première communion non parce qu’on ne m’avait pas parlé de Jésus, mais parce que j’avais de Jésus une si haute considération, grâce à l’enseignement de mon professeur de CM1 et l’exemple de ce Père aumônier, que je ne Le retrouvais pas dans les préoccupations trop matérielles de mes camarades de classe.

Je quittais mon Ecole catholique quelques années plus tard pour entrer au lycée. Je n’avais pas alors la foi, mais le Seigneur m’avait parlé à travers ces deux grands témoins. Le bon grain était semé.

mardi 22 janvier 2019

Dieu ou le néant - Dialogue avec les lecteurs

Suite à la publication de l'article "Dieu ou le néant" sur le blog Totus Tuus, une discussion s'instaure avec quelques lecteurs.

Commentaire n°1 posté par Miky

Bonjour Matthieu,

J'ai lu tes deux premiers articles sur la question de l'existence de Dieu ("Nier Dieu est devenu moins rationnel que croire en Lui" - Dieu ou le néant). J'apprécie fortement le fait que tu précises bien que Dieu n'est pas démontrable scientifiquement. Je pense que c'est un préliminaire important à toute discussion sur le sujet. Comme je le précise dans mon article sur l'appel aux causes transcendantes, c'est une erreur de prendre prétexte d'un phénomène inexpliqué et apparemment inexplicable pour en inférer une cause transcendante. Il se peut aussi que ce phénomène n'ait pas de cause (n'est-ce pas d'ailleurs censé être le cas de Dieu ?) ou que sa cause soit bien naturelle mais non encore élucidée.

Je suis cependant un peu étonné par ce passage : "je réalisais avec éblouissement qu’en l’état actuel de la science, nier Dieu est devenu moins rationnel que croire en Lui".

J'espère que tu éclaireras notre lanterne à ce sujet. Je ne vois pas trop comment la science pourrait fournir une justification rationnelle à la foi, pas plus qu'elle ne peut d'ailleurs fournir une justification rationnelle à la "non-foi" (à part dans les zones marginales où le contenu de la foi a des conséquences empiriques testables scientifiquement), surtout si on est bien d'accord sur le fait qu'en appeler à des causes transcendantes face à ce que l'on n'arrive pas à comprendre n'est pas rationnellement légitime. J'espère donc que tu ne vas pas nous servir des "arguments par l'ignorance" du genre de ceux qui sont apportés, me semble-t-il, par l'Université Interdisciplinaire de Paris pour justifier une convergence entre la religion et la science.

Bref, j'attend la suite avec impatience :-)

Commentaire n°2 posté par Miky

J'ai oublié quelque chose d'important :

Hasard ou Dieu, néant ou vie avec Dieu. Tu sembles présenter les choses comme un choix binaire, laissant supposer que réfuter un des choix accréditerait nécessairement l'autre. Pourtant, il y a d'autres possibilités que le hasard ou Dieu. Par exemple la contingence, qui est à distinguer du hasard car elle n'est soumise à aucune loi, contrairement au hasard qui obéit aux statistiques. Ensuite, entre le néant et la vie avec Dieu, il existe tout un panel de possibilités : vie sans Dieu, réincarnation, fusion dans le tout, etc.

Réponse aux Commentaires n°1 et 2

Bonjour Miky,

Concernant le passage que tu cites de mon premier article, il n’est pas de moi, mais d’André Valenta qui a écrit un livre remarquable sur le scientisme, et dont la phrase que tu cites est la conclusion. J’y souscris totalement, et je dirai même que c’est la grande découverte que j’ai faite dans ma vie de foi : à savoir que la science et la foi ne s’opposent pas, mais se complètent admirablement, et se rejoignent en une SEULE et UNIQUE Vérité.

Tu estimes – et c’est ton droit le plus strict – qu’il n’existe "aucune justification rationnelle à la foi" ; j’entends précisément démontrer le contraire. Que Dieu ne soit pas démontrable scientifiquement, c’est entendu, mais il existe des raisons de croire, et ce sont ces raisons que nous étudierons attentivement ces prochains mois.

Je trouve que tu vas un peu vite en affirmant qu’"on est bien d’accord sur le fait qu’en appeler à des causes transcendantes face à ce que l’on n’arrive pas à comprendre n’est pas rationnellement légitime". Ton appréciation ne me paraît ni raisonnable ni "scientifique" en ce sens que la démarche scientifique consiste précisément à n’exclure aucune hypothèse a priori, et à remettre sans cesse en cause ses propres certitudes. Je trouve vraiment dommage que tu évacues si vite la question du "surnaturel" au nom d’une rationalité... décidément bien peu raisonnable ! 

Concernant tes remarques sur la différence entre le hasard et la contingence, elles ne me paraissent pas pertinentes, car ce n’est pas parce que le hasard peut faire l'objet d'études statistiques qu’il obéit à des lois. Il me paraît abusif de dire que le "hasard obéit aux statistiques". Le hasard, par définition, est aveugle, il n’obéit à aucune logique, aucune loi, et le fait que ses manifestations puissent être appréhendées de façon statistique n’y change rien. Autrement dit : ce ne sont pas les statistiques qui font le hasard, mais le hasard qui fait les statistiques. Dire que j’ai une chance sur 1 million de gagner au loto, c’est une probabilité mathématique, ça n’est pas une loi.

Enfin, le "panel de possibilités" autres que l’existence d’un Dieu personnel auquel tu fais référence ("vie sans Dieu, réincarnation, fusion dans le tout… ") montre bien que l’on ne saurait s’en tenir aux données de la science pour trancher la question de Dieu. Autant l’étude du monde créé peut me dire quelque chose de Dieu (de son existence, de sa puissance, de son intelligence…), comme l’étude du tableau de la Joconde peut me dire quelque chose de Léonard de Vinci ; autant cela est insuffisant pour m’indiquer qui est Dieu (de même que la Joconde ne me permet pas de connaître Léonard de Vinci au-delà de son génie créateur : son histoire, sa vie, ses pensées, etc…). Il nous faut pour cela le donné de la Révélation, et nous aurons à examiner en quoi nous pouvons faire confiance à la Bible et à la Tradition catholique pour nous éclairer sur Dieu, son identité, sa volonté (son projet d’Amour pour l’humanité) et son Salut offert en Jésus-Christ à tous les hommes.

Commentaire n°3 posté par Gérard

Bonjour et bravo pour ce blog.

L'alternative n'est-elle pas entre le théisme et le panthéisme ? Ou bien l'univers est Dieu, ou bien Dieu est transcendant au monde. L'Être ne peut sourdre du néant c'est une évidence, et l'esprit ne peut sourdre de la matière brute et désinformée, c'est une autre évidence. Platon introduit le Démiurge tant l'atomisme lui parait irrationnel, Aristote développe une vraie théorie de l'information.

Mais l'Être absolu (Dieu ou l'Univers-Dieu) peut-il se transformer? Je ne crois pas car l'immutabilité de l'Être absolu semble en être l'une des caractéristiques essentielles. Or l'univers se transforme ; donc, il ne peut être cet Être absolu. Le Théisme parait donc la théorie la plus rationnelle.

Commentaire n°4 posté par Anne-Sophie

Bonsoir. Ne trouvez vous pas qu'il y a un énorme décalage ? Par le passé, les hommes expliquaient tout en disant que c'était l'oeuvre de Dieu. Aujourd'hui tout passe par la science. Les scientifiques sont souvent athées.

Vous m'avez réconcilié avec la religion.

Commentaire n°5 posté par Tyler

Bonjour, j’ai lu ton article avec un grand intérêt.

Je ne suis pas trop d’accord avec le fait qu’il est plus raisonnable de croire que de ne pas croire (je trouve ça même limite insultant pour un athée et pas très impartial. Enfin bref…)

Sinon, juste une remarque : tu pars sur la croyance ou l’athéisme (croire ou ne pas croire : quel débat!). Mais il y a aussi l’agnosticisme et je trouve que tu devrais aussi développer cette idée.

Réponse au Commentaire n°5

Je compte sur toi Tyler pour parler sur ce blog de l'agnosticisme, tu es certainement plus calé que moi! Je suis heureux en tout cas d'accueillir tes commentaires et disposé à débattre avec toi dans un esprit pacifié (j'ai vu que le ton monte assez vite sur ton site. C'est dommage car on prend d'autant plus plaisir à parler qu'on demeure dans un climat serein et amical).

Je suis navré que tu vois dans certaines de mes affirmations une "insulte" pour les athées. Je n'ai pas l'impression que Miky, qui se présente comme tel, ait eu l'impression d'être insulté sur ce blog. Je pense respecter tout le monde et les commentaires de chacun sont les bienvenus.

Mais je ne crois pas que le respect implique de faire des concessions sur le fond. S'accepter les uns les autres, c'est assumer aussi la différence, même lorsqu'elle nous gêne. Si je devais mettre mon drapeau dans ma poche pour n’offenser personne, alors je ne me sentirais pas moi-même respecté dans ce qu'il y a de plus intime et de plus profond en moi : ma foi en Jésus-Christ et mon appartenance à l'Eglise catholique.

Tu comprendras donc que je ne cherche pas à être "impartial". C'est d'ailleurs tout l'intérêt des blogs, me semble-t-il, que de permettre à chacun de s'exprimer librement selon ses convictions, ses pensées et sa foi (ou sa non-foi), et d'entrer en dialogue avec les autres.

Commentaire n°6 posté par Miky

Tyler et Matthieu,

Effectivement, je ne me sens aucunement insulté par les propos tenus sur ce blog. Je suis prêt à discuter avec n'importe qui défendant n'importe quelle idée (aussi saugrenue me paraisse-t-elle), du moment que cette personne respecte les règles d'un débat argumenté, convivial et tolérant, et n'ait pas peur de remettre ses idées en question.

Réponse à l’article de Miky sur l’appel aux causes transcendantes (publié sur son blog)

Cher Miky,

Je viens de prendre connaissance de cet article auquel tu m’as renvoyé sur l’appel aux causes transcendantes. Voici les réactions qu’il m’inspire :

1°) Je trouve que tu vas un peu vite en besogne lorsque tu écris qu’"on a démontré qu’il existe au moins un phénomène sans cause". On a démontré? Voire… Ta démonstration tient en ces mots : "Tout (…) n’a pas de cause. Sinon cette cause serait quelque chose extérieur à Tout, et Tout ne serait pas tout". C’est vrai. Cela, tout le monde peut le comprendre. Mais qu’est-ce qui te dit que le Tout que tu définis comme "l’espace-temps considéré dans sa globalité" soit vraiment… tout? Et s’il existait un Tout bien plus grand que le Tout que tu définis comme le monde, dans sa matérialité ? Bref : et si Dieu existait ? Tu pars du postulat qu’il n’existe pas, et c’est ton droit le plus strict, mais il ne s’agit que d’un postulat, nullement le fruit d’une démonstration.

2°) Je ne suis pas d’accord avec toi lorsque tu définis la cause transcendante comme "une cause située dans un aspect du réel inaccessible (…) à notre investigation (…), donc une cause que l’on ne peut identifier et étudier, une cause inobservable, avec laquelle on ne peut pas interagir, une cause que l’on ne peut pas expérimenter". Personnellement, je ne pourrais être croyant si je ne faisais quotidiennement l’expérience de la présence de Dieu dans ma vie. Un lever de soleil, les premières senteurs de printemps, le gazouillis des oiseaux, et c’est le Créateur qui parle à mes sens. Un temps de prière dans le silence, la lecture de l’Evangile du jour avant d’aller travailler, et c’est Dieu qui parle à mon cœur. Une rencontre, un sourire, le secours que je peux apporter ou recevoir d’un collègue de travail, et c’est mon Dieu qui me provoque à la relation, à l’amour, et à la communion.

Interroge de jeunes convertis. Ce qui me frappe chez eux, c’est qu’à travers la très grande variété de leurs histoires respectives et la particularité de chacun de leur parcours, il existe une constante que l’on retrouve systématiquement : ils parleront toujours d’une rencontre avec le Seigneur, d’une expérience de Dieu, de son Amour, suffisamment puissante pour que toute leur vie en ait été bouleversée… Je pense que ça vaut la peine de les écouter, d’autant que certains viennent de l’athéisme et que la conversion d’une personne reste toujours un mystère.

Cela dit, au-delà de ces expériences subjectives, il y a le fait objectif, historique, empirique de la Révélation. Dieu a fait irruption dans notre histoire en y laissant des traces que notre intelligence peut analyser et reconnaître comme venant authentiquement de Dieu. La Cause transcendante de l’Univers n’est pas lointaine et inaccessible ; elle s’est faite proche de nous – elle s’est faite homme, en Jésus-Christ.

3°) Tu évoques l’existence d’une "infinité de causes transcendantes possibles" pour déclarer qu’il est "préférable" de se réfugier derrière la théorie de l’absence de cause, qui a effectivement pour principal avantage d’avoir à éviter de prendre partie pour l'une ou l'autre des "causes transcendantes possibles". Mais la résolution de cette question de l’identité exacte de la Cause transcendante de l’Univers s’inscrit dans une seconde étape de notre réflexion sur l’existence de Dieu, qui nous conduira à l'étude de la Révélation divine. Car je le redis : les chrétiens croient en un Dieu qui parle et se révèle, en un Dieu qui agit et se manifeste.

En quoi la révélation chrétienne est-elle suffisamment convaincante pour nous donner à penser et à croire que le Dieu créateur de ce monde et de chacun de nous (de toi, de moi) est le Dieu révélé par Jésus-Christ, le Père de toutes miséricordes dont parle la Bible, qui a un projet de salut, de paix, de vie et d’amour pour toute l'humanité ? Voilà une question que tu devrais examiner de près…

4°) J’ai apprécié que tu ajoutes à la fin de ton article que par delà les avancées de la science, Dieu "Lui, demeure, comme hypothèse métaphysique possible." Si Dieu est une hypothèse métaphysique possible, pourquoi l’exclus-tu a priori?

lundi 21 janvier 2019

Dieu ou le néant


De toutes les grandes questions existentielles qui agitent l'esprit humain depuis l'aube des temps, je crois qu’il n’en est pas de plus importante que celle de Dieu et du sens de la vie.

Qui ne s'est jamais demandé d’où il vient et où il va ? Pourquoi il existe ? Pourquoi il souffre? Pourquoi il meurt ? Ce qu'il y a derrière le voile de la mort?

"Quel est le sens profond de notre vie? demandait un jeune homme à un journaliste d’une revue chrétienne. Je crois, disait-il, qu’on ne peut pas se gaver éternellement de ciné, de télé, de mode, de chansons. Il y a toujours un moment où se pose le problème du pourquoi de notre existence".

Qui sommes-nous vraiment ? Un éclair fugitif entre deux néants? Une petite bulle qui se gonfle un instant, pleine d’intelligence et de gloire, avant d'éclater dans le vide ? Le résultat accidentel d'un hasard aveugle dans un cosmos indifférent voire hostile ? Ou bien le fruit béni d'un Désir de Dieu qui nous a appelé à l'existence par Amour en vue de nouer avec chacun une relation intime et personnelle?

Sommes-nous seuls dans l'immensité de l'Univers? Ou bien y a-t-il un Dieu qui nous aime et pense à nous à chaque instant, formant pour nous de grands projets de bonheur et de vie?

Aucune question ne me paraît plus importante à résoudre que celle de l’existence de ce Dieu-là. Car l’homme ne peut vivre et se comporter de la même manière selon qu’il est aimé d'un Amour infini et éternel ou pas. L'on voudrait échapper à cette question que la vie se chargerait de nous la poser et re-poser sans cesse à l'occasion de la disparition de chacun de ceux que nous aimons. Mais où donc la mort les emportent-ils?...

Toutes les autres questions (scientifiques, techniques, économiques ou politiques) ont, elles aussi, leur importance et leur gravité, et de la réponse qu'on voudra bien leur apporter dépendra une part non négligeable du bien-être individuel et collectif. Mais toutes ces questions se heurtent finalement à une impasse inexorable qui les relativise considérablement : celle du vieillissement inéluctable et de la mort implacable. Mort de chaque personne humaine à la fin de sa vie ; destruction de l’espèce humaine tout entière lorsque s’éteindra notre soleil, et possiblement avant cette échéance ultime.

Une réflexion sur l’existence de Dieu ne constitue donc pas un élément marginal de la pensée humaine. Tout le sens de notre vie se joue et se décide dans cette question que nous avons à résoudre pour tenter de percer le mystère de l’existence humaine : Dieu existe-t-il ?

Blaise Pascal, enivré par les infinis l’entourant de toutes parts, écrivait dans ses Pensées :

"Je ne sais qui m’a mis au monde, ni ce que c’est que le monde, ni ce que je suis moi-même. Je suis dans une ignorance terrible de toutes choses. Je ne sais ce que c’est que mon corps, que mes sens, que mon âme et cette partie de moi-même qui pense ce que je dis, qui réfléchit sur tout et sur elle-même, et ne connaît pas plus que le reste.

"Je vois ces vertigineux espaces de l’univers qui m’enferment, et je me trouve attaché à un coin de cette vaste étendue, sans que je sache pourquoi je suis plutôt placé en ce lieu qu’en un autre, ni pourquoi ce peu de temps qui m’est donné à vivre m’est assigné ici plutôt qu’ailleurs de toute l’éternité qui m’a précédé et de toute celle qui me suivra.

"Je ne vois que des infinis de toutes parts, qui m’enferment comme un atome et comme une ombre qui ne dure qu’un instant sans retour.

"Tout ce que je connais est que je dois bientôt mourir : mais ce que j’ignore le plus est cette mort même que je ne saurai éviter.

"Comme je ne sais d’où je viens, de même, je ne sais où je vais ; et je sais seulement qu’en sortant de ce monde, je tombe pour jamais ou dans le néant, ou dans les mains de Dieu."

***

Dieu ou le néant ? Quel avenir pour l’homme ? Voici les questions auxquelles il nous faut tenter de répondre.

Il est bien entendu que Dieu ne se voit pas au microscope ni au télescope ; il échappe à l'appréhension scientifique des phénomènes - parce qu'il n'est pas de ce monde. La réponse à la question de l'existence de Dieu ne nous viendra donc pas des savants.

Pourtant, il faut choisir.

OU BIEN croire en Dieu malgré l’inévidence de son existence ("Notre Dieu est un Dieu caché", dit le prophète Isaïe) - et vivre sous son regard.

OU BIEN croire en un monde sans Dieu, malgré les obscurs mystères de notre origine, de notre être, et de notre destinée. Et vivre sans Lui.

Face à ce dilemme qui se présente à l’homme, il faut trancher. L’enjeu est trop grave pour que l’on esquive le sujet. Ne pas vouloir répondre est de toute façon une manière de répondre et de proclamer que Dieu ne nous intéresse pas. Comme disait Pascal, qu'on le veuille ou non, nous sommes "embarqués" dans l'aventure de la vie - avec sa destinée tragique. La question du sens est donc inévitable.

Cela dit : si les savants ne peuvent pas répondre à la question de l'existence de Dieu, qui pourra nous renseigner? La réponse est-elle seulement connaissable? Si oui, est-elle absolument certaine ou seulement probable? Et si elle est seulement probable, dans quelle proportion?

Telles sont les différentes questions que nous allons aborder ici au fil de nos articles à venir.

Nous allons voir que si l’on ne peut pas prouver scientifiquement (au sens moderne du mot) que Dieu existe, on peut démontrer aisément, je le pense, qu’il est raisonnable de croire, et même davantage : qu’il est plus raisonnable de croire que de ne pas croire.

Cette démonstration apportée, nous verrons qu'il existe des preuves de l'existence de Dieu. Celles-ci ne sont pas d'ordre scientifique (au sens moderne du mot) ; elles appartiennent plutôt à la catégorie des preuves métaphysiques. Pour autant, ce sont d'authentiques preuves en ce sens qu'elles sont objectivement convaincantes et non réfutables par des propositions rationnelles alternatives. Que la métaphysique nous fournisse des preuves peut surprendre - mais c'est parce que l'on a oublié que la métaphysique est une authentique science, capable de communiquer à l'esprit humain des certitudes aussi solides que celles obtenues dans le domaine des sciences positives.


Discussion avec les lecteurs suite à la publication de cet article

dimanche 20 janvier 2019

"Le problème de l'avortement est un problème de philosophie naturelle"

En ce jour de Marche pour la Vie, je vous livre un extrait de l'Introduction à la théologie chrétienne de Claude Tresmontant, une des plus grands philosophes catholiques du siècle passé (1925-1997). 

"Ce n'est (…) pas l'Eglise qui impose, du dehors, du haut de son autorité, des exigences, des normes. L'Eglise voit ces normes inscrites dans la réalité objective, et elle les enseigne, comme elle enseigne certaines vérités philosophiques, métaphysiques, que chacun peut discerner aussi dans la réalité objective. 

"Prenons le cas de l'avortement. L'Eglise est absolument opposée à la pratique de l'avortement, qu'elle considère comme abominable. Mais ce n'est pas un caprice de sa part, ni une décision arbitraire. L’analyse objective d'un embryon dans le ventre de sa mère montre que cet embryon est organisé, informé. Dès le commencement, l'embryon est un psychisme, un psychisme inconscient, non éveillé, mais un psychisme authentique. Les travaux de la psychologie des profondeurs, depuis bientôt un siècle, ont établi qu'il existe une vie psychique de l'embryon. Si l'embryon n'était pas organisé, informé, il ne serait pas un embryon : il ne serait que de la matière, c'est-à-dire un cadavre. Cette information, cette organisation, la tradition philosophique, depuis Aristote, l'appelle "âme". C'est une convention. On peut parfaitement appeler autrement, et comme on voudra, ce fait que l'embryon est une Structure informée, organisée, et qu'il est un psychisme. Si le mot "âme" dégoûte, qu'on se dispense de l'utiliser. Il n'en reste pas moins que l'embryon est un être, un être vivant inachevé, organisé, et que c'est un psychisme. Le système nerveux se forme très tôt clans le développement embryonnaire. Il joue probablement un rôle de commande dans le développement embryonnaire. 

"Bien entendu, l'embryon n'est pas un être achevé. Mais le bébé dans son berceau n'est pas non plus un être achevé. Et un enfant d'homme peut sortir de la matrice plus ou moins tôt. Il peut naître prématuré. 

"Si tuer un enfant dans son berceau est considéré comme un crime, comme un meurtre, comme un assassinat, particulièrement odieux, on ne voit pas comment tuer le même enfant avant qu'il ne sorte du ventre de sa mère, pourrait ne pas être un assassinat du même ordre. 

"L'âme ne vient pas dans l'embryon à la naissance, lorsque l'enfant sort du ventre de sa mère. L'âme est ce qui constitue l'embryon, l'âme est le principe d'organisation, d'information. L'âme est ce qu'on appelle dans une autre langue (le grec, au lieu du latin...) le psychisme inconscient de l'enfant dans le ventre de sa mère. 

"Il est impossible de fixer arbitrairement un moment où l'embryon ne serait pas animé, puis un moment où il le serait. L'embryon est toujours organisé, informé, c'est-à-dire animé, sinon ce ne serait pas un embryon du tout. 

"Il ne faut pas jouer sur les mots. Il ne faut pas se duper en modifiant le vocabulaire. Il faut avoir le courage de nommer ce que l'on fait. Tuer un embryon d'homme dans le ventre de sa mère, c'est tuer un enfant d'homme, inachevé, au même titre que le bébé qui vient de naître et qui dort dans son berceau. Il n'y a pas une différence de nature entre l'enfant qui vient de naître et l'enfant qui était un jour ou un mois plus tôt dans la matrice. Si tuer un enfant dans son berceau est un meurtre, un crime, un assassinat, alors tuer le même enfant dans la matrice, un mois, deux mois, six mois plus tôt, c'est toujours et exactement le même crime, le même assassinat. 

"Si l'on estime que l'homme ne doit pas tuer un homme vivant, ni un enfant, ni un bébé dans son berceau, alors il ne doit pas tuer non plus le même enfant dans le ventre de sa mère. 

"Le problème de l'avortement est un problème de philosophie naturelle. La question est simplement de savoir ce que c'est que cet embryon dans la matrice. Il n'est pas possible d'établir une discontinuité entre cet enfant dans la matrice et le même enfant dans son berceau. Le crime est le même, que l'on tue celui-ci ou celui-là. 

"Voilà ce que pense en effet l'Eglise. Mais elle ne le pense pas au nom de la Révélation. Elle le pense parce que c'est ainsi, et qu'elle le voit, et que tout homme normal, raisonnable et de bonne foi, le voit pareillement. Cela ne dépend pas d'une théologie. Cela se conclut de l'analyse objective de ce qui est. 

"Dans les controverses actuelles, les personnes qui désirent obtenir la liberté de l'avortement, déclarent : "mon corps est à moi". Sans doute, ces personnes sont des corps, et ces corps qu'elles sont, ces organismes vivants que sont ces femmes, sont autonomes, libres. Mais l'erreur, le sophisme, en ce qui concerne l'avortement, consiste à en déduire : "donc j'ai le droit de tuer l'enfant qui est dans mon organisme". 

"Car l'enfant qui est en train de se développer dans la matrice d'une femme, n'est pas sa propriété. C'est là que se trouve l'erreur. On peut être propriétaire d'une maison. On n'a pas le droit pour autant de tuer les gens qui y passent, les gens qui y viennent ou y séjournent. On n'a pas le droit de tuer un hôte qui est sous votre toit. La loi de l'hospitalité était dans les peuples civilisés une loi sacrée. 

"L'enfant qui se développe dans la matrice d'une femme n'est pas sa propriété. C'est un hôte. 

"On objectera aussitôt : mais enfin, c'est la femme qui a fait cet enfant qui est en elle. Donc cet enfant est à elle, il est sa propriété. — [Mais] l'enfant qui se développe dans la matrice de la femme, ce n'est pas la femme qui l'a créé. La femme a communiqué un message génétique. L'homme a communiqué un message génétique. A partir de ces deux messages, un enfant d'homme se forme, une personne est conçue. Mais ni l'homme ni la femme ne sont au sens propre créateurs de cet enfant. Ils ont coopéré à une création. Ils ont fourni chacun un message génétique. Et la création s'opère dans le sein de la femme. Mais la femme n'est pas créatrice de cet enfant nouveau qui est en effet créé. L'enfant n'est pas sa propriété, au sens où l'artisan peut être propriétaire de l'objet qu'il a fabriqué. L'artisan peut détruire s'il le veut l'objet dont il est l'auteur. Mais la femme n'a pas le droit de tuer l'enfant qu'elle a enfanté, lorsqu'il est né, car il n'est pas sa "chose". Et elle n'a pas plus le droit de le tuer avant qu'il ne soit né, pour la même raison.

"En réalité, tuer un enfant dans son berceau, après sa naissance, ou dans la matrice, avant sa naissance, est le crime le plus grave qui soit, puisqu'on prive un enfant de sa vie d'homme, de son temps de développement. Il est admis, dans les sociétés dites civilisées, que tuer un homme d'âge mûr, ou un vieillard, est un crime, un assassinat. Lorsqu'on tue un homme ou une femme d'un certain âge, on les prive des années qui pouvaient leur rester à vivre. Lorsqu'on tue un enfant au début de son développement, on le prive d'une vie entière. Le crime est donc beaucoup plus grand. 

"L'Eglise enseigne tout cela, non parce que c'est révélé, mais parce que c'est vrai. Il suffit de réfléchir un instant et sans prévention pour le voir. 

"La différence entre l'Eglise et quelques hommes ou quelques femmes, c'est que l'Eglise aime les êtres, et qu'elle estime qu'on ne doit pas tuer des êtres qui sont, qui ont le droit de se développer et de vivre. Elle aime les êtres vivants, et en particulier les hommes vivants. 

"Bien entendu, si l'on n'aime pas les hommes vivants, les enfants vivants, les êtres vivants, si l'on estime qu'il est de peu d'importance de tuer les êtres vivants, alors on peut aussi être partisan de l'avortement. Mais dans ce cas-là il faut professer ouvertement, franchement, qu'on estime de peu d'importance et de peu de prix la vie humaine. 

"L'Eglise attache un prix infini à la vie humaine. Elle a le regard fixé sur l'être des êtres, et elle aime cet être. Tout homme normal peut avoir le même regard, qui va droit à l'être. Il n'est pas nécessaire d'être juif ou chrétien pour aimer les êtres qui sont. Le problème de l'avortement est un problème de philosophie naturelle. 

"C'est un problème qui relève de l'ontologie. Les normes éthiques, à cet égard, sont dérivées d'une considération, d'une analyse, de ce qui est. Elles ne sont pas déduites d'une théologie posée au préalable, et d'une manière arbitraire. Il suffit d'avoir le sens de l'être et l'amour de l'être pour reconnaître que l'avortement est le plus abominable des crimes, car il porte contre des êtres que l'on prive ainsi de leur vie entière, de leur temps de développement, qui ne peuvent aucunement se défendre, et qui n'ont pas d'avocats. 

"A propos de la question de l'avortement, qui est aujourd'hui soulevée parmi les nations qui se disent elles-mêmes, par dérision, "civilisées", on peut constater que la méthode de l'homicide est toujours la même : c'est d'abord le mensonge. L'homicide et le mensonge sont liés. Dans les guerres coloniales récentes, pour massacrer des hommes de l'Indochine, certains utilisaient une expression abominable : "casser du viet". Ces hommes du Viêtnam étaient transformés, par le langage, par cette expression, en une matière, que l'on casse, une matière indéfinie. Pendant la récente guerre d'Algérie, d'autres (ou les mêmes) osaient utiliser l'expression que l'on ose à peine citer : "crever du raton". Là encore, la méthode consistait à réduire, par le langage, des hommes créés à l'image de Dieu, au rang d'une espèce animale. Lorsque les massacreurs nazis ont exterminé des millions d'hommes, dans les camps de mort, ils ont commencé par enseigner que ces hommes ne faisaient pas partie de l'espèce humaine, puisqu'ils appartenaient à une race autre que la race aryenne. 

"De même pour l'avortement. Afin de procéder à ce massacre de millions d'enfants dans le ventre de leur mère, pour justifier ce massacre, pour ne pas avoir à supporter l'angoisse intolérable qui résulte de la conscience que l'on a de tuer un enfant d'homme, on commence par déclarer qu'il ne s'agit pas d'un enfant d'homme. On compare la grossesse à un "empoisonnement". D'autres ont osé comparer le fœtus d'homme à une "tumeur" cancéreuse. Le procédé est toujours le même. Il s'agit de nier, en parole, par le langage, qu'il s'agisse d'enfants d'homme. Il se trouvera toujours un savant pourvu d'un prix Nobel pour rassurer les consciences en affirmant que l'embryon n'a pas de psychisme ou même (cela s'est vu), qu'il n'a pas de système nerveux! Or, il suffit de consulter les traités d'embryologie les plus élémentaires pour apprendre que le système nerveux est ce qui se forme en tout premier lieu dans l'embryon. On a même entendu un professeur de médecine déclarer à des millions d'auditeurs que la femme enceinte est en état de "légitime défense"! L'enfant qu'elle porte en elle est donc comparé à l'assaillant, à l'ennemi qui vient attaquer, à l'assassin ou au voleur qui vous menace! 

"A partir du moment où l'on se permet de telles comparaisons, il est évident que la discussion positive, rationnelle, scientifique n'est plus possible. 

"Dans quelques années, lorsque les enfants qui auront échappé au massacre sauront ce que leurs mères ont fait avec d'autres enfants qu'elles portaient en elles et qu'ils n'ont évité le même sort que par hasard, ils regarderont leurs mères d'une étrange manière. Le docteur Freud n'a pas eu l'occasion de dégager la signification de ce regard-là. Mais ses disciples pourront le faire."


vendredi 18 janvier 2019

Pourquoi faire de la théologie quand on est chrétien?

Nous avons vu dernièrement pourquoi il était essentiel pour un chrétien de faire de la philosophie : parce qu'au fondement de tout, il y a Dieu dont il faut bien se poser la question de l'existence. Si Dieu n'existe pas, alors autant aller planter des choux. La vie chrétienne serait vaine et pathétique. Nous serions les plus malheureux de tous les hommes (cf. 1 Co 15. 19)

Nous avons vu également pourquoi il était important de faire de l'apologétique : parce que l'existence de Dieu étant posée, il faut se débrouiller avec les religions. Laquelle est la bonne? Quand on a démontré Dieu, on n'est pas arrivé au bout du chemin. Il ne suffit pas d'établir qu'Il existe, il faut encore rechercher qui Il est. Car des dieux, il en existe un certain nombre sur le "marché". Il faut donc rechercher si le Dieu dont la raison philosophique parvient à établir l'existence s'est manifesté de quelque manière pour se faire connaître - s'il a communiqué avec nous. Comme le disait Mgr André Vingt-Trois à la Messe de Noël au Sacré-Coeur de Montmartre (Paris 18e) : "S'il n'y a aucune communication avec Lui, alors son existence ou son inexistence ne nous intéresse pas".

L'apologétique aura pour tâche d'établir tour à tour :
- le fait de la révélation à Israël,
- le fait de la manifestation de Dieu en Jésus-Christ,
- le fait de la continuation de l'oeuvre du Christ dans l'Eglise catholique.

La vérité du christianisme étant établie par le travail apologétique, le travail du chrétien s'arrête-t-il là? Non bien entendu. A vrai dire, il n'a pas encore véritablement commencé. Car la philosophie et l'apologétique sont des oeuvres de la raison humaine s'employant à penser le fait de l'Univers physique et de tout ce qu'il contient (pour la philosophie) et le fait de la Révélation (pour l'apologétique). Or, le chrétien est invité à vivre de la foi (cf. Ha 2. 4). Même si c'est la foi qui incite le catholique à investir du temps pour faire de la philosophie et de l'apologétique, ce ne sont pas là des oeuvres de la foi - en ce sens qu'elles ne présupposent pas la foi pour être accomplies correctement. 

Puisque je sais maintenant - au terme de mon cheminement philosophico-apologétique - que Dieu existe et qui Il est - le Dieu de Jésus-Christ -, alors je vais pouvoir Lui donner ma foi - ou pas. Si j'estime que ce Dieu là est véridique et digne de confiance, alors je vais écouter ce qu'il me dit - car le Dieu des chrétiens parle. Et Il parle pour nous révéler qui Il est et ce que nous sommes pour Lui, ce à quoi il nous destine pour l'éternité - toutes choses qu'aucune science humaine ne pourrait découvrir par elle-même, puisqu'elles sont le secret de Dieu.

C'est ici que commence la théologie. Dans l'écoute attentive et priante de la Parole de Dieu. Le vrai théologien, disait Hans-Urs Von Balthasar, est le théologien à genou. La théologie en effet - à la différence des deux autres disciplines - présuppose la foi. Elle se réalise dans une écoute docile à la Parole du Maître à qui l'on reconnaît une autorité pour nous enseigner.

Par nature, le théologien est un disciple. De même que le savant reçoit sa science des informations communiquées par l'Univers physique à l'enseignement duquel il se plie sans discuter - de même, le théologien nourrit son intelligences des informations communiquées dans Sa Révélation par Dieu à l'enseignement duquel il se soumet sans contester - et comment le pourrait-il? Il n'a aucun moyen de vérifier par lui-même si ce que Dieu dit est vrai ou non. Il n'a d'autre choix que d'y croire. Cela dit, s'il y croit, c'est qu'il a des raisons d'y croire - des raisons de penser que Dieu est digne de confiance lorsqu'il l'instruit de vérités mystérieuses. Voilà pourquoi la raison est si essentielle à la foi : enlevez la raison, et la foi finira par tomber - comme un peintre se cassera la figure si vous lui retirez l'échelle sur laquelle il est installé.

La raison conduit à la foi théologale - et la foi théologale, à la raison théologique. Autrement dit : "Jamais Dieu ne demande à l'homme de faire le sacrifice de sa raison ! Jamais la raison n'entre en contradiction réelle avec la foi ! L'unique Dieu, Père, Fils et Esprit Saint, a créé notre raison et nous donne la foi, en proposant à notre liberté de la recevoir comme un don précieux." (Benoît XVI)

C'est la raison croyante qui est théologienne lorsqu'elle s'applique à penser le contenu de la révélation, à méditer la Parole de Dieu et les mystères de la religion catholique. Non pour les élucider comme on résoudrait une énigme - erreur commise par beaucoup d'hérétiques. Mais pour mieux s'en délecter.  "Le mystère n'est pas un mur contre lequel on bute, disait le Père Descouvemont, mais un océan sans rivage qu'on n'a jamais fini d'explorer." Plus nous pensons les mystères de notre foi, plus nous en découvrons des aspects nouveaux qui ravissent notre âme et font grandir en nos coeurs l'amour et la joie. La théologie a une finalité contemplative.

"Tant qu’il ne fait qu’établir contre les incroyants ou les hérétiques (...) que telle proposition est vraiment du domaine de la Foi ou s’y rattache, [le théologien] ne travaille qu’à certifier l’existence de la vérité. C’est trop peu pour nos intelligences de savoir que telle proposition appartient au domaine de la Foi et que nous devons y adhérer ; nous voulons ensuite scruter et contempler en elle-même cette vérité pour jouir de sa lumière. Nous voulons, dans la mesure du possible, saisir l’harmonie des termes qui la composent et saisir aussi l’harmonie de ses rapports avec le monde de la vérité tout entière. C’est ici que viennent ces sublimes envolées qui n’enferment plus nos esprits dans une sèche et aride discussion de textes, mais qui ouvrent à nos âmes les splendides horizons du monde de la nature, du monde des âmes, du monde des esprits, du monde divin lui-même en qu’il a de plus éblouissant et de plus radieux. Qui nous dira les joies d’âme du théologien (...) qui vit habituellement dans ces sublimes régions ? Et se peut-il concevoir rien de plus grand, en même temps que de plus "utile", au sens profond de ce mot, que d’initier les âmes à ces magnificences ? Qui donc oserait prétendre que nous ne devons plus désormais vaquer à ces hautes spéculations et que nous devons nous contenter de ce qu’il y a d’exclusivement positif dans le rôle du Docteur sacré ? Autant vaudrait étouffer en nous le désir du divin ou nous en interdire l’accès, après nous avoir certifié qu’il existe. Mais c’est au contraire plus que jamais que nous avons besoin aujourd’hui de voir en elles-mêmes et de goûter dans leur synthèse harmonieuse les vérités de notre Foi. S’il n’est pas destiné à donner la Foi quand on ne l’a pas déjà (...) ce travail d’explication et de développement lumineux aura pour résultat d’affermir les âmes croyantes en leur donnant le goût savoureux des choses de la Foi." (P. Thomas Pègues, dans son Commentaire de la Somme théologique de Saint Thomas d'Aquin)

Voilà pourquoi un chrétien doit faire de la théologie. Bien plus : voilà pourquoi le chrétien est un théologien - par nature. Parce qu'il est un croyant ; parce qu'il écoute la Parole de Dieu ; parce qu'il est doué de raison et que celle-ci trouve (sur)naturellement à s'appliquer à la Parole de Dieu - pour mieux la comprendre, pour mieux en vivre et pour mieux en rendre compte autour de lui.

Pour ne pas s'égarer dans le travail théologique ni raisonner de travers au risque de développer une pensée contraire à celle de l'Eglise (piège dont tant d'hérétiques sont tombés dans le passé), le croyant catholique veillera au strict respect des règles du Code de la route théologique imposant aux intellectuels catholiques de se conformer à l'enseignement de l'Ecriture Sainte, de la Tradition et du Magistère - car la Parole de Dieu ne peut être comprise en vérité qu'en Eglise, dans la communion et non dans la désunion - laquelle est une tentation venant de l'Adversaire de l'Eglise. S'il peut arriver que l'Esprit Saint nous donne quelque lumière inédite sur tel ou tel aspect de la Parole de Dieu ou sur un mystère de la foi, il s'agira d'en éprouver l'authenticité en la confrontant à la pensée constante de l'Eglise et à ses Dogmes - qui bornent le territoire de la pensée catholique et marquent une limite à ne pas franchir. Car Dieu ne peut pas se contredire. S'il semble qu'il y ait contradiction entre l'une quelconque de mes pensées et celle de l'Eglise, il me faudra être prêt à y renoncer - car on ne peut avoir raison contre toute l'Eglise. C'est à elle en effet que le Seigneur a promis son assistance et sa protection contre "les portes de l'enfer" (cf. Mt 16. 18). Pour ne pas se perdre sur les sentiers de cette vie, le chrétien-théologien aura à coeur de conserver sur lui la boussole de l'Eglise - Don Bosco aurait dit des 3 Blancheurs : le Pape, l'Eucharistie et la Vierge Marie. Là où se trouvent ensemble ces trois réalités, là se trouve le vert pâturage où la brebis pourra s'épancher et s'ébattre en toute sécurité.